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Une plainte choquante

Vous dirigez une petite entreprise. Kevin, un de vos travailleurs, fait régulièrement l’objet de blagues et de remarques en raison de son homosexualité, même devant les clients. Vous ne réagissez pas face à ces comportements car vous estimez que ce ne sont que des plaisanteries. Il y a de la bonne humeur dans l'équipe et celle-ci clôture ses chantiers avec succès. Mais, un jour, Kevin, fatigué de ces remarques, décide de déposer une plainte motivée pour harcèlement et discrimination. La conseillère externe en prévention communique son rapport établissant les faits. Vous êtes choqué de la réaction de Kevin et vous décidez de le licencier pour motif grave.

Avis juridique

La répétition des blagues et allusions pourraient être constitutives d’un harcèlement et, de surcroît, elles portent à la connaissance de toute la clientèle l’orientation sexuelle de Kevin. On ne peut préjuger du contexte hostile que pourraient engendrer la rumeur et les allusions au sujet de Kevin. Le harcèlement a été établi par la conseillère en prévention. Il est lié avec l’orientation sexuelle de Kevin. Il s’agit donc d’un harcèlement discriminatoire.

Législation sur le bien-être au travail et contre le harcèlement

Le travailleur bénéficie, après avoir déposé une plainte formelle, d’une protection contre le licenciement (pendant 12 mois) à moins que les motifs invoqués pour le licenciement ne soient étrangers à la plainte. La charge de la preuve incombe à l’employeur. Dans ce cas, le tribunal estime que la rupture du contrat de travail est irrégulière car l’introduction des plaintes ne constitue pas un motif grave. La personne recevra donc des indemnités.

Avis au manager

L'humour fait partie de notre vie et a également sa place sur le lieu de travail. Bien entendu, tout le monde ne partage pas le même humour; c'est là que le bât blesse. Ce qui, pour l'un, est simplement une bonne blague représentera, pour l'autre, un total manque de respect. Souvent les blagues véhiculent des stéréotypes à l’égard des groupes minorisés. Un-e travailleur-se qui est la cible d’une blague de ses collègues peut se sentir mal à l’aise et ne pas oser réagir ou se sentir obligé-e de faire bonne figure en riant avec eux. Si les autres collègues n’interviennent pas, la personne peut se sentir isolée et impuissante.

La frontière entre l’humour et le harcèlement est souvent mince : au-delà de l’organisation des tâches, les managers doivent être attentifs aux comportements des travailleur-euse-s. Lorsque l’humour entre collaborateurs va trop loin, le supérieur doit intervenir sans tarder.
Le manager doit s’appuyer sur le règlement du travail, les règles de déontologie professionnelle et la loi bien-être au travail. Les messages devront être clairs et transmis à toute l’équipe. Des formations ou des sensibilisations sur les stéréotypes, des communications de la direction sont des signes que l’entreprise a la volonté que tou-te-s ses travailleur-euse-s soient respecté-es au-delà de leurs différences. De plus, la cohésion et le respect dans les équipes de travail entraîne de meilleures performances.
Unia a publié en 2010 les résultats d’une enquête portant sur le vécu des lesbigays ouvriers. Elle démontre que ces derniers cachent souvent leur orientation sexuelle et développent des stratégies d'évitement ou de dissimulation pour pallier les stéréotypes péjoratifs les concernant.

© Unia • Centre interfédéral pour l’égalité des chances • www.ediv.be